Lise Chevalier nous fait passer, dans son triptyque à l’encre sur papier, de la nuit souterraine au jour lumineux, des couleurs terre aux multiples nuances de vert. Genèse végétale est la création d’un paysage sensoriel où les salicornes, feuilles de roseau, herbes des friches, rhizomes et autres plantes méditerranéennes nous entraînent dans leur poétique.
Plusieurs parties composent le triptyque comme plusieurs images juxtaposées pour créer un mouvement de l’une à l’autre : paradoxalement, elles finissent par s’animer dans un fondu enchaîné immobilisé. C’est le mouvement des choses qui est rendu aux choses : Lise Chevalier nous tient en lisière de sa fiction picturale et de son émerveillement.
Sa démarche conceptuelle est aussi celle de l’agrandissement : la nature change d’échelle, elle est ici monumentalisée. Peut-être pour mieux nous faire sentir notre immersion dans ses images originelles. Lise Chevalier nous invite à une expérience physique et scopique au sein de laquelle on sent bien que l’espace, à la fois morcelé et homogène, est aussi mental, intérieur, symbolique, utopique. Lise Chevalier explore et fait découvrir, par le prisme de son triptyque pictural et poétique, un monde aussi complexe qu’inaltéré.
Le labyrinthe n’est pas dans le réel dessiné mais dans la vision de Lise Chevalier elle-même. C’est son regard labyrinthique qui manifeste l’étrangeté et la poésie de son panorama végétal. La nature contradictoire du labyrinthe est ici vérifiée : tout en perdant, il retrouve. Tout en perdant nos yeux et notre corps dans les images de Lise Chevalier, nous y retrouvons notre chemin entre une réalité perdue et un réel retrouvé. Nous intériorisons notre sensation pour laisser place à nos propres paysages imaginaires.
texte de Kristell Loquet «D’une lisière l’autre»